Faire du nucléaire une question éminemment politique…

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A écouter certains responsables politiques, la sortie du nucléaire serait, non seulement un non-sens économique, mais serait tout simplement impossible. Partant de là, il serait même inutile d’en débattre…

Point de vue de Stéphen Kerckhove, délégué général d’Agir pour l’Environnement.

La France, du fait de son monolithisme énergétique, ne pourrait ainsi plus décider de son avenir énergétique, prisonnière d’une pensée unique plaçant le nucléaire au-dessus de la démocratie.

Avec une étonnante facilité, droite et « gauche » semblent tenter par un pseudo consensus national qui une nouvelle fois oublie un peu facilement que le peuple souhaite pouvoir influer sur son avenir en général et sur son futur énergétique en particulier.

Le nucléaire n’est pas et ne doit pas être un sujet adémocratique. Le nucléaire, comme toute option technologique, doit être questionné car il influe sur notre avenir. Que certains technocrates qui ont construit leur pouvoir sur la complexité d’un système inefficace soient favorables au nucléaire n’est pas très étonnant. Que des responsables politiques renoncent à ce qui fait leur légitimité, à savoir proposer des options pour l’avenir de notre pays, est plus étonnant.

Comme sur la finance et l’économie, de plus en plus de sujets ne font plus l’objet de décisions démocratiques, le peuple étant suspecté de ne pas être à la hauteur des décisions que seule une oligarchie éclairée pourrait prendre en lieu et place des citoyens.

Ceci est d’autant plus inacceptable que sur le nucléaire en général et le réacteur de Flamanville en particulier, l’option défendu par le droite et une partie de la gauche est très loin de faire consensus. 77% des français se prononcent pour une sortie progressive du nucléaire. Seule une trentaine de pays ont recours au nucléaire et trois pays (La France, les Etats-Unis et le Japon) concentrent 50% des réacteurs actuellement en fonctionnement dans le monde. Le nucléaire ne produit que 2,5% de l’énergie finale consommé au monde. Le nucléaire n’est donc pas la solution mais une spécificité qui confine à la marginalité industrielle.

Concernant l’EPR de Flamanville, faut-il poursuivre la construction d’un réacteur dont personne ne veut, économiquement catastrophique et énergétiquement inutile ? Comble de l’ironie, alors que la France s’apprête à passer un hiver difficile faute de capacités de production suffisamment flexibles pour répondre aux demandes de pointe, notre pays au lieu de diversifier son bouquet énergétique s’enferme dans le toujours plus de nucléaire… Nucléaire, technologie lourde et inappropriée pour répondre aux fluctuations de la demande électrique hivernale.

La France fait fausse route en s’enfermer dans l’idéologie nucléariste. Les citoyens auront-ils leur mot à dire dans une campagne présidentielle qui ne peut se résumer à une somme de non-dits et mensonges. La démocratie ne doit plus se limiter à des débats inutiles sur la couleur de la tour de refroidissement. Le nucléaire est un sujet éminemment politique et doit donc faire l’objet d’un vaste débat sur son avenir. Il est possible de sortir du nucléaire. Mais faute de décideurs politiques responsables, il nous serait impossible de débattre d’une éventuelle sortie. Ceci est évidemment inacceptable et nous ne nous laisserons pas voler ce débat démocratie nécessaire.